
PEXELS- Ardeshir Etemad
Les chiffres, comme les témoignages, appuient un constat déjà ancien mais trop peu entendu sur la situation dans les maisons d’arrêt.
Un geste symbolique et provocant
L’image a marqué les esprits au tribunal de Paris. Selon TF1 INFO, lors d’une audience de prolongation de détention provisoire, Me Romain Boulet a présenté au juge un rat qu’il avait baptisé "Marie-Madeleine". D’après les propos de l’avocat, il a capturé l’animal le matin même sur le parking de la maison d’arrêt de Nanterre. Il a été exhibé devant l’auditoire et le magistrat pour illustrer concrètement la réalité quotidienne des personnes incarcérées. Maître Boulet a déclaré ne pas pouvoir montrer de photos, les appareils étant interdits dans l’enceinte des prisons. Sa démarche, plutôt originale, voulait compenser l’impossibilité de prouver l’insalubrité autrement. Face au juge des libertés et de la détention, il a rappelé que les cellules et douches sont souvent souillées, faute d’entretien. Jusque-là aucune réponse satisfaisante n’est donnée aux plaintes des détenus et de leurs défenseurs.
Une surpopulation inquiétante
Selon les données officielles du ministère de la Justice, 84 447 personnes étaient emprisonnées au 1er juin 2025, pour seulement 62 566 places disponibles. Le taux d’occupation atteint 165,6 % en maison d’arrêt, là où séjournent les détenus en attente de jugement ou condamnés à de courtes peines. Ce niveau de surpopulation génère des tensions, dégrade les conditions sanitaires et favorise la prolifération de nuisibles, dont les rats. Plusieurs rapports ont déjà alerté les autorités. La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, la Cour européenne des droits de l’Homme ou encore les associations de défense des droits des détenus sonnent l’alarme régulièrement sur l’état de délabrement des établissements pénitentiaires français.
Une réponse judiciaire mais peu de changement de fond
Romain Boulet a poursuivi sa démonstration en détaillant les risques sanitaires : la variole du singe, la toxoplasmose, la leptospirose et l’hépatite sont autant de maladies transmissibles par les rats. Selon lui, les détenus y sont exposés au quotidien, dans l’indifférence générale. À l’issue de l’audience, le juge n’a pas prolongé la détention provisoire du client de Me Boulet. Ce dernier bénéficiera d’un contrôle judiciaire à sa sortie prévue fin juillet, à Nanterre. Avant de clore la séance, le juge a interrogé l’avocat sur le sort réservé à Marie-Madeleine.