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Fonction publique et entreprises fragilisées
Les données disponibles dressent un bilan alarmant. Plus de 2 800 licenciements ont été enregistrés à Maurice en six mois. Ce chiffre soulève des interrogations sur l’évolution du marché du travail mauricien. Les vagues de renvois se succèdent dans plusieurs institutions, rapporte Défi Média. La Local Government Service Commission a mis fin aux contrats de 1 700 employés municipaux. Ce coup dur touche l’ensemble des collectivités locales. Dans le secteur parapublic, des réductions d’effectifs ont également eu lieu. Le Central Electricity Board, la SENA, la Tourism Authority ou encore le National Parks and Conservation Service ont supprimé une centaine de postes au total. En février, la Banque de Maurice a licencié 25 salariés, en invoquant une procédure conforme à la loi. Le secteur privé enregistre aussi des pertes massives. L’usine Star Knitwear a renvoyé 240 salariés en février, puis 483 autres en juin, après avoir été placée sous administration judiciaire. La construction est également frappée. Kuros Construction Ltd a remercié près de 300 employés, dont une centaine de Mauriciens.
Des mutations profondes
Pour l’économiste Sanjay Matadeen, ces licenciements ne provoquent pas nécessairement une hausse du chômage. Selon lui, le pays souffre surtout d’un déséquilibre structurel. Le manque de main-d’œuvre dans plusieurs secteurs empêche les chiffres de refléter la réalité du marché. Il rappelle que certains employés occupent des postes inférieurs à leurs qualifications. D’autres cherchent activement à évoluer. Il évoque aussi le vieillissement de la population active. Des secteurs, notamment ceux à forte intensité physique ou technologique, ont du mal à intégrer les travailleurs plus âgés. D’où l’urgence, selon lui, d’une réforme du système éducatif. Il recommande de mieux orienter les jeunes en difficulté scolaire et de valoriser les filières techniques. Le secteur informel, en pleine expansion, reste un angle mort des politiques publiques. Pourtant, de nombreux actifs y échappent à toute forme de régulation.
Vers un nouveau modèle de formation et d’emploi
Barthélemy Aupée, spécialiste du recrutement, constate les mêmes tendances. Il évoque l’impact de la pandémie, suivi de transformations rapides du marché. Le textile, dopé un temps par la vente en ligne, est désormais en retrait. Le tourisme, après une relance hésitante, subit encore des ajustements. Par ailleurs, l’intelligence artificielle modifie la demande, surtout dans les services externalisés comme les centres d’appels. Une autre problématique concerne la baisse de la natalité qui réduit progressivement le vivier de travailleurs jeunes. Les entreprises se tournent alors vers des expatriés. Une partie des travailleurs informels hésite à intégrer le système classique, préférant l’indépendance à un emploi structuré. Barthélemy Aupée critique également la rigidité du système de formation. Les droits acquis au sein d’une entreprise ne suivent pas l’individu après un licenciement. Il plaide pour une portabilité de ces droits, inspirée de modèles étrangers, afin d’encourager les reconversions professionnelles.
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